Crowdfunding par le don : est-ce rentable ?

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IMAGE: CORBIS ANDREW BAKER

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La valeur ajoutée d’une campagne de crowdfunding par le don est ailleurs que les fonds récoltés

Samedi 6 juin 2015, j’ai participé à la seconde édition de la Fête du Crowdfunding co-organisée par l’association Financement Participatif France et l’ESCP Europe.

Pour les non-initiés, le crowdfunding – ou en bon français le financement participatif – peut prendre trois formes : investissement en capital, prêt et don. Ici, je parle uniquement de campagnes de financement par le don, chaque don étant récompensé par une contrepartie.

L’atelier Comment se préparer et bien mener sa campagne en don ? où sont intervenus Meryl Bes (MyAnnona), Charles Babinet (KissKissBankBank), Camille Mollard (MyMajorCompany) et Igor Krinborg (Lunii, la belle Fabrique à histoires dont le projet fut porté par Ulule) était particulièrement instructif.

Préparer et mener une campagne est un investissement lourd

Pour qu’une plateforme de crowdfunding par le don accepte un projet, deux critères doivent être remplis :

  • que le projet et son (ses) porteur(s) ait une communauté suffisamment large et solide au départ – et capable de croître pendant la campagne – pour montrer que la somme recherchée est possible d’être levée. La somme dont on pourrait avoir besoin n’est pas forcément la somme que l’on peut lever.
  • que la contrepartie proposée soit en adéquation avec le niveau du don reçu et qu’elle soit réalisable tant sur le plan financier que dans des délais raisonnables.

Plusieurs mois de préparation sont requis avant de lancer une campagne, qui dure en moyenne un mois : obtenir l’appui des deux premiers cercles de son réseau (ou communauté), s’assurer qu’ils fassent la promotion du projet, établir une liste de contacts presse / blogs et les alimenter d’informations pour qu’au moment voulu ils fassent le buzz, préparer des contenus pour nourrir sa campagne de levée de dons et les contreparties attendues, etc.

La campagne en elle-même requiert un fort taux d’implication afin de générer trafic et dons — réactivité aux questions et commentaires de donateurs potentiels, un grand travail de réseautage, de relance, d’alimentation de contenu, d’animation sur les réseaux sociaux et de patience et “positivisme” sans faille de bout en bout.

Le travail ne cesse avec une levée réussie, car il faut évidemment tenir sa communauté au courant des avancées du projet pour lequel elle a été sollicitée.

Mener une campagne peut coûter cher

Dans un article pour Mashable, The Truth About Crowdfunding: 5 Debunked Misconceptions, Aubre Andrus souligne qu’une campagne peut coûter très cher.

Entre la production de vidéos professionnelles ($2 000 à $5 000), embaucher un expert en marketing spécialisé dans ces campagnes ou un spécialiste des médias sociaux ($2 000 à $4 000), et obtenir de l’aide pour les RP (jusqu’à $400 de l’heure), on peut dire qu’il faut de l’argent pour gagner de l’argent. Et ceci sans prendre en compte le coût des prototypes ou la valeur de votre propre temps.   (traduction PL)

En effet, et surtout dans un modèle du tout ou rien – seuls les projets qui ont atteint 100% des dons demandés reçoivent les fonds, il faut être prudent. Moins d’un tiers des projets sont financés, et ce sont surtout les les rares importantes levées dont nous entendons parler. Les statistiques propres de Kickstarter (datées de mai 2014) sont édifiantes:

Mener sa campagne par soi-même serait-il plus financièrement rentable ?

Dans le cas de Lunii, cela a mobilisé 5 personnes à plein temps pour lever 42 000€, montant plutôt exceptionnel puisque la majorité des campagnes tournent autour de 
4 500€.

On peut donc se demander si, d’un point de vue purement financier, une campagne de crowdfunding par le don est un exercice vraiment rentable.

Prenons une campagne qui lève 4 500€ et ne mobilise qu’une personne pour 3 mois (2 mois de préparation, 1 mois de campagne). De ces 4 500€ il faut déduire la commission de la plateforme (entre 5 et 10% suivant celle-ci). D’où un équivalent mensuel en dessous du SMIC, avant déduction du coût des contreparties (conception, production, frais de livraison s’il y a lieu, ou manque à gagner, par exemple, dans le cas de places de spectacles offertes).

Le gain est ailleurs

Une campagne de financement participatif par le don est une brique majeure dans la conception d’une stratégie de communication globale (mais les porteurs de projets en sont-ils conscients au préalable, ou sont-ils majoritairement focalisés sur leur besoin de financement ?)

En élargissant et renforçant leurs communautés, les porteurs de projets développent aussi de fait leurs portefeuilles de prospects – un donateur devant plus facilement (et à moindre coût) un client futur qu’un inconnu. Grâce au travail préparatif, à la campagne en elle-même, et à l’entretien de la communauté d’internautes, la notoriété du porteur et la visibilité de son projet grandissent.

Combien aurait pu coûter l’acquisition d’une ou plusieurs bases de données de prospects validés ou une campagne de pub / comm’ / RP traditionnelles de “l’ancien monde” pour faire connaître et lancer une pépite telle que Lunii ?

Voilà donc le vrai ROI d’une campagne de financement participatif par le don compte tenu du montant moyen levé par ce type de campagne.

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Article également publié sur LinkedIn Pulse.

 

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